Notre économie se transforme! La récession liée au COVID-19 est différente de celles que nous avons connue précédemment. Depuis mars 2020, nous avons été témoins de perturbations majeures des sources de revenus municipales en raison des restrictions liées à la pandémie. Partout au Canada, les perturbations de l’impôt foncier et la perte de frais d’utilisation ont entraîné une incertitude budgétaire, limitant radicalement la capacité décisionnelle des dirigeants municipaux. Le recours au télétravail a réduit la demande de stationnement payant, générant ainsi un autre obstacle à la capacité des gouvernements locaux d’augmenter leurs revenus. De nombreux centres communautaires, arénas, et piscines sont fermés ou fonctionnent à une capacité considérablement réduite, ce qui a pour conséquence de réduire les revenus perçus des programmes communautaires.
Ces changements ont créé un véritable défi pour les gouvernements locaux. Comment les gouvernements locaux – en particulier ceux dont l’assiette fiscale est plus petite – peuvent-ils suivre le rythme des mises à niveau des infrastructures et des programmes d’immobilisations de routine nécessaires, tout en planifiant également de nouveaux services communautaires dans un environnement où les flux de trésorerie sont devenus à ce point imprévisibles? En discutant récemment avec un directeur général, nous avons plaisanté sur la façon dont les circonstances actuelles poussent les responsables de l’ingénierie à devenir comptables alors qu’ils tentent d’équilibrer les implications budgétaires et déplacer les coûts entre les budgets d’investissement (ponctuel) et opérationnel (permanent).
Contraintes de trésorerie
Les principaux flux de revenus étant épuisés, les dirigeants municipaux doivent maintenir des budgets opérationnels équilibrés. Cela crée un manque d’élasticité dans les programmes d’investissement et réduit la capacité des gouvernements locaux à faire preuve de souplesse ou à profiter de subventions ponctuelles de financement des infrastructures.
Pour contrer les effets de cette nouvelle réalité financière, de nombreuses municipalités ont dû prendre des décisions difficiles, incluant dans certains cas des mises à pied et la réduction ou le report des programmes d’immobilisations. De plus, nous avons constaté une capacité réduite à planifier efficacement la gestion des actifs. À l’avenir, nous ne pouvons pas supposer que les flux de revenus concernés reviendront immédiatement aux niveaux d’avant mars 2020, de sorte que les gouvernements locaux doivent planifier une reprise progressive et quelque peu imprévisible. Je crois fermement que nous assistons au début d’un changement démographique alors que les gens ont apprivoisé le télétravail et se sont adaptés à de nouvelles manières de travailler.
Même avant la pandémie de COVID-19, nous étions déjà dans une situation de déficits d’infrastructure largement documentée. Bien que les programmes de financement fédéraux existent depuis longtemps pour aider à combler ces déficits, le déploiement des fonds du programme a été au mieux cahoteux.
Les dépenses en immobilisations et le maintien des infrastructures en bon état soutiennent la croissance économique et apportent de la valeur à la collectivité. De nombreuses promesses de campagne électorale reposent sur cette prémisse. Cependant, comme les ressources municipales internes sont sollicitées ou fonctionnent à leur capacité maximale, la capacité d’un gouvernement local à exécuter ces programmes d’immobilisations est proche du point de rupture dans de nombreuses régions du Canada.
Alors, comment un gouvernement local défavorable aux risques et limité dans les frais qu’il peut assumer aborde-t-il ces préoccupations et tient ses promesses? Quelques éléments à considérer sont:
- Maximisation de l’efficacité du capital et utilisation des dépenses en capital par rapport aux dépenses opérationnelles
- Accéder à autant de programmes de subventions fédéraux et provinciaux que possible
- Trouver des moyens d’accéder à une capacité flexible et à faible risque sur le marché
Aligner ses priorités
Les programmes de financement fédéraux et provinciaux sont hautement sollicités. En 2020, nous avons constaté une demande d’environ 10 $ pour chaque tranche de 1 $ de financement disponible. En termes simples, cela signifie qu’environ 90% des demandes de financement ont été rejetées. Je pourrais écrire un article entier concernant cette problématique, cependant, je dirai simplement ici que, pour accéder au financement de ces programmes, les gouvernements locaux doivent se démarquer et s’aligner étroitement sur les priorités des autres. Les gouvernements locaux deviennent plus que jamais les fiers propriétaires des priorités d’autrui.
Bien que centrée uniquement sur la planification préliminaire, la valorisation du projet et des raisons pour lesquelles il devrait trôner au sommet des priorités est essentielle à sa réussite globale.
Il y a cependant un hic. Vous devez d’abord investir le coût opérationnel, sans aucune garantie de succès du financement. Ce seul facteur de risque a conduit de nombreux gouvernements locaux à ne tout simplement pas demander de financement par crainte d’être refusés. Dans cet esprit, un examen stratégique de votre programme d’immobilisations peut vous permettre de maximiser vos chances d’obtenir un financement avec succès.
L’un des principaux critères utilisés pour ces programmes de financement est d’évaluer si votre projet ou votre priorité vaut la peine d’être entrepris. Il ne s’agit plus de bien faire un projet; il s’agit maintenant de vous assurer que vous faites le BON PROJET.
- Un projet est prêt à démarrer lorsque vous avez obtenu les approbations, licences et permis nécessaires et que vous êtes prêt à commencer la construction. Un aspect important à retenir ici, ce n’est pas parce que votre projet est prêt à être construit qu’il doit être construit. Un équipement communautaire qui était la priorité absolue en 2019 n’est peut-être plus nécessaire aujourd’hui.
- Cependant, un projet doit être construit s’il profitera à la communauté, à l’économie, à l’environnement (pensez à la réduction des GES) ou idéalement aux trois. Il fait généralement partie d’un plan d’immobilisations existant sur cinq ou dix ans et comprend des tâches de gestion des actifs telles que des études, des études de marché et des travaux de projet préparatoires qui aident les approbateurs de subventions gouvernementales à comprendre le besoin, la valeur et les avantages de votre projet. Il est également aligné sur les priorités des différents paliers de gouvernement tels que les municipalités, les districts régionaux et / ou les Premières nations pour n’en nommer que quelques-uns.
Le processus d’approbation de ces demandes de financement incombe généralement aux ministères provinciaux. Un fait souvent négligé est que le personnel ministériel n’aime pas plus rejeter votre candidature que vous n’aimez en recevoir le rejet. Tous les représentants provinciaux à qui j’ai parlé ont répété à plusieurs reprises: «Appelez-moi à l’avance. J’aiderai ». N’oubliez pas que ces représentants doivent examiner toutes les demandes qu’ils rejettent, donc plus de demandes mal rédigées équivaut à plus de travail pour eux. Soyons pro-actif!
Flexibilité sans responsabilité
Outre les subventions, chaque gouvernement local a un vaste programme d’immobilisations soutenu par des millions de dollars d’impôts chaque année. Ces programmes comprennent des projets de routine nécessaires pour maintenir les infrastructures communautaires locales en bon état. Avec des budgets opérationnels limités, la flexibilité au sein de ce programme est primordiale. D’après notre expérience, nous constatons que la municipalité canadienne moyenne fournit habituellement moins de 70% de son capital de routine alloué au cours d’une année budgétaire donnée.
En plus de ces immobilisations de routine, de nombreuses organisations extérieures planifient simultanément (mais ne communiquent pas nécessairement) des programmes d’immobilisations au sein des juridictions municipales. Il s’agit notamment des administrations portuaires, des infrastructures ferroviaires du CP et du CN, ainsi que des grands fournisseurs de services publics comme le gaz, les télécommunications et l’électricité. Ces projets tiers exigent que des ressources municipales soient affectées aux programmes, mais leur calendrier échappe souvent au contrôle municipal. L’impact en aval de cette situation a exacerbé le problème du report des infrastructures municipales de routine aux années futures.
Pour expliquer ce phénomène en termes simples, les grands projets, qu’ils soient les vôtres ou ceux de tiers, absorbent souvent les capacités internes et celles provenant du marché. Cela conduit souvent à des programmes importants, mais non prioritaires, tels que la réparation des trottoirs ou l’entretien de routine des bâtiments ou des infrastructures linéaires, victimes d’un report, car le personnel travaillant sur ces projets est redéfini par ordre de priorité ailleurs.
Pour rémédier à ce problème, de nombreux gouvernements locaux se tournent vers les contrats d’offre à commandes, également appelés contrats d’exécution sur demande ou contrat d’enregistrement du fournisseur. Ces véhicules contractuels achetés publiquement offrent aux gouvernements locaux la flexibilité de pouvoir ajouter de la capacité en appelant un partenaire à court préavis sans supporter aucun coût hérité, ce qui en fait une utilisation du capital très efficace et à faible risque. Ces dispositions peuvent être utilisées non seulement pour fournir l’infrastructure existante qui fait partie du plan d’immobilisations de l’année en cours. Ils peuvent également être utilisés pour la planification et l’application requises sur les opportunités de subvention qui deviennent disponibles au cours de l’année. Essentiellement, vous disposez de l’aide appropriée lorsque vous en avez besoin, et vous n’avez aucun impact financier lorsque vous n’avez pas besoin d’aide.
Le fait d’avoir ces partenaires collaboratifs en réserve vous donne non seulement une longueur d’avance en matière de ressources d’experts, mais vous donne également accès à des offres de construction potentiellement plus faibles grâce à des tactiques telles que le regroupement et vous garantit de ne pas reporter les projets en raison d’un manque de disponibilité.
Par exemple, une municipalité de la Colombie-Britannique a engagé notre équipe pour aider à éliminer les goulots d’étranglement de son programme d’immobilisations après une année où elle n’a livré que 44% de son budget alloué pour les immobilisations courantes. En nous intégrant au sein de leur équipe d’ingénierie dans le cadre d’une offre à commande, nous avons contribué à réduire les goulots d’étranglement d’approvisionnement, pris en charge certains programmes de routine et fourni des capacités là où et quand la ville en avait besoin. Une grande partie de notre travail consistait à prendre des projets qui étaient encore en phase de conception et à les faire approuver, concevoir et préparer pour la construction. Nous remettions ensuite les projets aux ressources internes de la ville pour qu’elles soient livrées par la construction. Cette approche a permis à la ville de rester concentrée sur les projets prêts à l’emploi, ce qui a eu un impact considérable sur la réalisation globale des indicateurs de performance clés (augmentant le pourcentage du capital dépensé de 44% en 2017 à 96% en 2020).
Remarques conclusives
L’économie canadienne sera changée à jamais par le COVID-19. Le télétravail risque de s’installer définitivement dans plusieurs milieux professionnels. L’équilibre travail-vie privée a été remplacé par l’intégration du travail dans l’environnement familial. En conséquence, de nombreuses communautés pourront attirer des travailleurs qualifiés comme jamais auparavant. Ceux qui avaient auparavant besoin de vivre à proximité du centre-ville de nos grandes villes peuvent désormais vivre au bord du lac ou près d’une station de ski locale. Les équipements communautaires seront un puissant moteur du processus décisionnel pour de nombreux Canadiens qui cherchent où s’installer avec leur famille. S’assurer que les communautés font appel à ces travailleurs qualifiés sera essentiel et exigera que les dirigeants des gouvernements locaux prennent les mesures nécessaires pour améliorer leur capacité à obtenir des financements et à tirer le meilleur parti de leurs budgets d’investissement.
Votre communauté est-elle prête à tirer parti de cette opportunité? Les impôts et les projets d’immobilisations ne se réduisent pas à quatre murs, un système de construction ou un tuyau dans le sol. Ils sont aussi derrière vos souvenirs de famille, l’air frais que vous respirez et l’eau potable que vous buvez. À mon avis, c’est ainsi que nous mesurerons le succès à l’avenir.